- CAN YOU SAVE ME ?

C'est grave de s'obliger à ressembler à tout lemonde : cela provoque des névroses, despsychoses, des paranoïas.
Paoulo COELHO

Voir. Ça semble si simple, c'est iné, quand on voit on ne pense pas ne pas voir sauf métaphoriquement, peut-être. L'action de voir comme de respirer, par exemple, est un acquis pour l'être humain, d'ailleurs pour tout les êtres vivants. Mais lorsque vous avez été privé de ça vous vous rendez compte. Vous vous rendez compte à quel point voir est puissant, important. Et c'est si perturbant de se retrouver dans ce noir profond, sans fin, sans une once de lumière. Ma première impression fut d'avoir l'impression de mourir, que j'allais mourir. Que tout était fini, absolument tout. Et se relever c'est difficile. Mais avec toutes les nouvelles technologies pour une partie de ces êtres qui ont perdu la vue ou ne l'ont jamais connu il y a de l'espoir. Je n'en reviens pas d'utiliser ce mot et par moi-même en plus ! Cette greffe a changé ma vie. Je vois. A nouveau. Je vois. Mais je fais plus que voir de l'ordinaire. Je vois des … des... je sais pas ce que je vois. Je vois … je vois des choses, des sortes d'esprits. Je pppf je deviens folle. Je … Je La jeune femme éteint le magnétophone. Elle tremble, elle tremble de peur. La peur elle la connait bien. Elle la côtoya longtemps mais cette fois-ci elle a pris une autre forme. Elle voit des choses, des gens, des âmes ? Elle les voit, elle peut leur parler, mais les autres ne les voit pas. C'est déstabilisant, c'est complètement fou. Il faut qu'elle en parle mais elle à peur, peur d'être prise pour une folle. Mais n'est-elle pas folle ? Et si on lui trouvait une tumeur ? Si c'était ça la cause de ce qu'elle nomme ses hallucinations.

Mais pour le moment personne ne la connaissait ici alors personne ne savait pour ses hallucinations. D'ailleurs, quand bien même elle aurait des amis sans doute aurait-elle été incapable d'en parler. Parce que... parce que ça la dépasse. Cette histoire la dépasse. Et ça l'énerve, elle est en colère. Certes, la colère elle connait, c'est une fidèle compagne, une colère qu'elle tourne contre elle-même. Ici pas d'amis, quelques connaissances, pourtant nombreux pouvaient avoir déjà vu son visage. Dans la ville voisine, d'une envergure supérieure en population, des affiches de la jeune femme était placardée sur les tableau d'affichage. Un concert de violon avait eu lieu une semaine auparavant. Et sur cette affiche où elle était superbe, habillé d'une somptueuse robe bleu marine en compagnie de son violon, bien évidemment, était écrit dans une écriture fine "La prodige du violon.". Pour le moment, ce concert était le dernier. En effet, Zhora avait pris la décision de faire une pause. Normalement c'était pour s'habituer à sa nouvelle vie mais en plus de ses apparitions cette pause était plus que nécessaire. Mais parfois, elle se demandait si avoir un emploi du temps de travail rempli pouvait l'aider à s'en sortir. Alors au lieu du travail, son temps elle le passait à visiter la ville mais surtout à refaire la maison qu'elle s'était achetée. Passant des heures à peindre, à poncer, à acheter des meubles etc. Elle s'amusait du moins elle tentait. De temps à autres un esprit venait lui rendre visite. Mais la journée fut tout de même bonne, aujourd'hui elle s'était lancée dans la découverte de la librairie. Y passant une heure elle finit par acheter cinq magasines et quelques livres. Une aubaine pour le propriétaire qui voyait en cette charmante jeune femme une excellente cliente qui pourrait devenir régulière. Et une belle fille parfaite, son fils l'aidait ce jour-là et il tenta de charmer la violoniste. Restant polit elle avait tout de même montrer son désintéressement.

On pourrait continuer de décrire la journée de la jeune femme mais il y en aurait pour un bout de temps, en tout cas elle mangea une délicieuse escalope gratinée en repas. Mais lorsque la nuit enveloppa la ville les esprits se firent plus nombreux. Ne supportant plus d'être enfermée à l'intérieur elle choisit de se balader en ville. Elle croisa quelques couples, des groupes d'amis, ou encore des familles. Et puis des esprit mais elle tenta de les oublier. Cette petite balade la mena jusqu'à un grand bâtiment et la jeune femme décida de s'y attarder. Et ce uniquement parce qu'il y avait un banc en face de la bâtisse. Alors elle s'assit et contempla le ciel. C'était magnifique, les étoiles, bon aussi les petites lumières des avions, la lune. C'était superbe ! Combien de temps passa-t-elle à observer les étoiles ? Elle n'en savait rien mais ce qui la distraya c'est une sensation étrange. Alors elle baissa son regard pour observer les alentours. Il devait être tard puisque les rues étaient quasiment désertes, mais une silhouette s'approchait. Et rapidement elle comprit qui c'était. C'était lui. LUI. Un inconnu, un inconnu étrange pour une rencontre étrange. Ce lieu aussi était étrange : la morgue, mais ça elle n'y avait pas prêté attention. Peut-être qu'il était là depuis longtemps ? Peut-être qu'il l'observait ? Peut-être... peut-être ! Peut-être qu'elle était attirée par lui, peut être mais Zhora est incapable de manifester ses sentiments surtout s'il faut l'expliquer. Alors elle se contenta de l'observer. Entrouvrant légèrement la bouche ces quelques mots s'y échappèrent Qui êtes vous ? Sa voix était douce et écorchée, ce n'était qu'un murmure, un murmure dans la nuit, un souffle. Normalement il ne devrait pas l'entendre, mais il n'est pas humain, n'est-ce pas ?

❝ the tragedy of human life consists in our vain attempts to stretch the limits of things which can never become unlimited, to reach the infinite by absurdly adding to the rungs of the ladder of the finite. ❞

Courir ne fait pas parti de mes principales occupations. Courir n'est en rien ce qui m'est le plus précieux en ce monde. Courir n'est absolument pas ce qui me maintient en vie actuellement, ce qui me permet de poursuivre sans avoir mal, ce qui s'immisce en moi comme un vulgaire esprit. Je ne fais pas parti de l'espèce la plus intelligente parmi les démons, je vous l'accorde, mais je n'en suis pas moins pour autant dangereux, cruel, sanguinaire ... Il y a de ça trois-cent ans, celle qui m'avait engendrée s'est permise de me laisser seul, sans explications, sans même me dire quoi faire lorsque l'on vient de se faire engendrer. J'étais un vampire ayant peur de l'inconnu, ayant peur de moi-même, ayant surtout peur de me faire définitivement tuer. L'air de rien, en apparence je ne donne l'air que d'être à peine plus âgé que la vingtaine, mais lorsque l'on enfonce son regard dans le mien, lorsque l'on essaie de voir ce qu'il y a au fin fond des abysses de mon âme, il est véridique que cela risque d'être plus troublant qu'autre chose. Manger. Manger est une de mes principales occupations. Mine de rien, ce goût métallisé qui infeste mes lèvres, ma bouche et ma gorge lorsque je me nourris me manque. Cette sensation de vider une vulgaire proie de toute son hémoglobine ne me rend pas heureux ni euphorique mais me donne cette simple impression de pouvoir que jamais aucun démon ne pourrait avoir. Être un buveur de sang est une philosophie de vie, être un buveur de sang est surtout réputé pour quelques minables personnes se sentant de passer dans l'au-delà. Ces derniers, je les tue. Simplement. Qu'ils ne me fassent pas perdre mon temps. Tuer, Ô tuer ... Rien que de prononcer ce verbe me hérissait les poils du dos. Sentir ces frissons parcourir mon échine pendant que je chasse, pendant que je me sustente, pendant que je tue, Dieu quelles sensations. Jamais aucun autre démon ne pourrait ressentir ce que je ressens, c'est évident, et j'en suis certain.

La nuit se faisait fraîche sur Kentwood, aussi fraîche que d'habitude, mais il y avait ce petit vent qui vous glaçait le sang à peine sorti. J'avais pour habitude de marcher un peu dans le noir lorsque je ne parvenais pas à m'endormir, et non comme le pensent tout un tas de personnes les vampires ne dorment pas en plein jour et ne brûlent pas au soleil, je prenais mon temps, humant l'air frais de cette soirée. Il y avait cette voix, cette petite voix qui me transperçait le crâne, qui s'immisçait dans mon esprit et me rendait petit à petit fou. ❝ Tu n'es qu'un misérable vampire Gaël, tu le sais n'est-ce pas ? Pourquoi t'obstines-tu à tuer alors que tu pourrais t'allier avec de nombreuses personnes qui sauraient tirer profit de ton expérience ? Pourquoi vouloir jouer le cavalier seul ... N'oublies pas que je sais tout de toi. ❞ Rien que ces quelques phrases me rendaient fou de rage, je ne parvenais pas à savoir de qui elles provenaient, et encore moins les raisons pour lesquelles elles m'étaient destinées. Tout ce que je savais, c'est que c'était tout ce qu'il y a de plus désagréable, d'horrible et d'incessant. ❝ MAIS QUI ES-TU ? ET QUE ME VEUX-TU HEIN ? POURQUOI NE ME LAISSES-TU PAS EN PAIX ? POURQUOI S'ACHARNER SUR MOI ? Je ne suis qu'un putain de banal vampire ... Un vampire qui ne souhaite pas faire équipe, un vampire solitaire. Par pitié, fous-moi la paix, qui que tu sois, quoi que tu me veuilles. JE NE SUPPORTE PLUS QUE TU FASSES L'INTRUS DANS MON ESPRIT BORDEL, TU PIGES ÇA ? ❞ Je n'en revenais pas. Je me surprenais à gueuler seul, dans la rue, parce que j'avais des horribles migraines à cause de cet enfoiré qui s'amusait. Je n'osais imaginer si j'avais croisé le chemin de quelqu'un que je connaissais ou pas d'ailleurs ... Le désarroi s'emparait lentement de moi, comme si de rien n'était. Sans m'en rendre compte, je m'étais lentement dirigé vers des endroits que je ne connaissais évidemment. Non pas que j'y sois familier mais n'importe quel vampire devait connaître cet endroit, auquel cas, ce dernier n'était pas réellement un buveur de sang.

J'observais le ciel, la nuit était claire mais néanmoins parsemée d'étoiles et d'astres de part et d'autre de ce ciel noir. Il y repensa, souvent, il croisait cette jeune femme brune, celle qu'il observait longuement comme si intrigué par cette dernière. Non pas qu'elle me fascinait mais c'était pratiquement le cas. Allégeant le poids de mes pas, je me glissais lentement dans l'enceinte du bâtiment blanc, aussi immense soit-il, mais j'avais besoin de calme. Et Dieu seul sait que les hôpitaux ne sont pas un endroit très accueillants en plein milieu de la nuit mais surtout assez flippants mine de rien. Levant mes bras derrière ma nuque, je poursuivais petit à petit ma route lorsqu'une sensation subite de froid intense m'envahit entièrement, me laissant circonspect de tant de froideur. Elle était là, c'était évident. Me plaçant derrière un pylône, j'attendis. ❝ Qui êtes-vous ? ❞ Voilà les simples mots qui sortirent de sa bouche. Restant derrière mon pylône, je ne dis rien, me contenant de la fixer dans le noir.

- CAN YOU SAVE ME ?

Dans la nuit qui m'environne, dans les ténébres qui m'enserrent, /Je loue les Dieux qui me donnent une âme, à la fois noble et fière. / Prisonnier de ma situation, je ne veux pas me rebeller. / Meurtri par les tribulations, je suis debout bien que blessé. / En ce lieu d'opprobres et de pleurs, où je ne vois qu'horreurs et ombres / Les années s'annoncent sombres mais je ne connaîtrai pas la peur. /Aussi étroit soit le chemin, bien qu'on m'accuse et qu'on me blâme /Je suis le maître de mon destin, le capitaine de mon âme.
Willam Ernest HENLEY

Un claquement de doigt, puis un second s'échappèrent dans la nuit. La jeune femme restait, en apparences, calme. Restant debout sans bouger. Quelques secondes après avoir claqué ses doigts un chien arriva près d'elle. Il s’asseye. Un assez imposant chien. Un peu plus grand qu'un labrador et bien plus poilu. Avec un pelage gris et quelques tâches beiges. Il fut pour elle une bouffée d'air quand elle avait perdu la vue cet bête pleine de poiles lui avait re-donné le sourire. Et depuis ils ne se quittaient plus. E.C.